Autopsie d’une agression impunie
Le soir du 11 octobre 2008, un commando encagoulé, armé de matraques et de bombes lacrymogènes, défonçait la porte du bar fribourgeois Elvis et Moi et y causait pour plusieurs dizaines de milliers de francs de dégâts, fracassant le mobilier et les instruments du quintette italien Camerata Mediolanense.
Action aussitôt revendiquée par un groupe «antifasciste», accusant pêle-mêle le groupe (au nom faussement traduit par un martial Kameradschaft Mailand, alors que «Camerata» signifie… orchestre de chambre!) et l’association organisatrice de sympathies d’extrême droite.
En tant que membre de SoleilNoir, association avec laquelle j’ai organisé une douzaine de concerts depuis 2002 sans le moindre problème ni débordement, j’étais présent ce soir-là. Je peux témoigner que si l’attaque n’a fait «que» des dégâts matériels, c’est uniquement parce que personne parmi nous n’a osé s’interposer – les policiers fribourgeois en ont fait l’expérience.
Nous sommes restés sous le choc. Effarés, incrédules. Mais la réaction de la plupart des médias allait nous choquer bien plus encore. Car c’est nous qui nous sommes retrouvés coupables… d’«ambiguïté»! A en juger par les titres de presse gratuite, un crime plus dangereux que la violence extrême, froidement planifiée et fièrement revendiquée de nos agresseurs… et qui semblait même la justifier en partie.
Pour certains, très clairement, l’extrémisme haineux, brutal, primaire, ne saurait être que «de droite» – un extrémiste de gauche n’étant forcément qu’un jeune utopiste rêveur et plutôt sympathique. Alors qu’on peut quand même s’interroger sur la différence fondamentale entre une action «antifasciste», comme celle de Fribourg, et une agression contre un centre de requérants d’asile, par exemple.
Peut-être que la principale différence entre ultragauche et extrême droite réside dans leur traitement médiatique. L’extrême droite, ce vieil épouvantail, ce repoussoir indispensable, c’est le Mal. Au moindre soupçon, infatigablement, il doit être dénoncé comme tel – peu importe qu’il ne compte guère plus de 200 suppôts, selon la police fédérale, alors que les «antifas» (négativité pure, trahie par le préfixe «anti» et l’absence totale d’idéal substitutif!) seraient dix fois plus nombreux, et plus actifs, par le nombre d’actes de violence.
Soyons sérieux. Le fascisme est mort et enterré depuis six décennies, il ne reviendra pas, du moins pas sous sa forme historique. L’«antifascisme» sans fascisme est devenu le pendant contemporain de l’Inquisition médiévale. Un phénomène d’hystérie collective, où une Sainte-Vehme insaisissable et anonyme prononce des condamnations définitives, des fatwas politiquement correctes.
Les dénégations des accusés ne valent rien face aux affirmations de quelques inquisiteurs, interrogés dans la presse en tant que «spécialistes de l’extrême-droite», toujours les mêmes, réputés infaillibles et neutres (la bonne blague!). Et, parfois, comme à Fribourg, des bandes organisées finissent par «faire justice» elles-mêmes. Et qui pourrait leur en vouloir? Visiblement, pas les médias.
Quatre mois après l’incident, les casseurs – auxquels aucun journaliste n’a jamais semblé s’intéresser – courent toujours.
24heures / 11.02.09